Regards croisés sur Robert Capa 

 

La deuxième guerre mondiale et certains événements importants qui sont venus après la guerre sont en général connus uniquement en noir et blanc.

La pellicule couleur a été mise au point en 1936 par Kodak. Reporteur et photographe, Robert Capa, né en Hongrie, a capturé ses premières images en couleur juste deux ans après, en 1938. Néanmoins, ce serait plusieurs années avant que le grand public réalise que de telles photos en couleur existent.

Ce n’était pas juste qu’il ait pris les photos en couleur mais quelles couleurs ! Ces photos sont super nettes et les couleurs tellement saturées. C’est comme si Capa était encore vivant et qu'il avait pris ces images hier.

Robert Capa a travaillé pour les plus grands titres internationaux de son époque. Parmi eux on trouve les plus prestigieux magazines de l’ère comme Holiday, Saturday Evening Post, Life, Paris Match, Ilustrated et Pix. Ses intérêts et ses projets l’ont mené autour du monde : au Maroc, en Espagne, en Italie, en Angleterre, en Chine, aux États-Unis, au Vietnam, en Union soviétique (Moscou, Ukraine, Géorgie) en Hongrie, en Italie et en Israël.

Les compositions de Capa peuvent être également plus belles que les tableaux créés par les plus grands maîtres, peu n’importe qu'il travaillait très fréquemment dans des conditions difficiles. Il a réalisé des compositions extraordinaires dans des conditions éprouvantes et j’imagine presque impossibles, au milieu de la bataille, par exemple. Néanmoins, ces images montrent un équilibre extraordinaire et une harmonie comme si les figures étaient en train de danser.

Capa était un génie capable de capturer un corps en plein mouvement et en même temps rendant la relation avec les objets secondaires dans la scène et les alentours d'une manière sensible, logique et harmonieuse.

 

me si c’était souvent impossible de publier ces images en couleur en raison du temps nécessaire pour développer le film qui était très sensible et qui nécessitait un contrôle précis de la température, Capa avait l’habitude d’emporter presque toujours au moins deux appareils photo : l'un pour le noir et blanc, l’autre pour la couleur, donc il existe un large enregistrement en couleur de ses projets.

Daniel 

 

Lors de ma visite de l’exposition « Robert CAPA et la couleur » une photographie a retenu tout particulièrement mon attention. Elle a été prise au cours d’un reportage au Maroc en 1949. Ce n’est qu’après mon retour de l’exposition que je me suis aperçu qu’elle avait séduit également les organisateurs car elle a servi de support à l’affiche  de la manifestation.

Cette photographie met en scène un groupe d’une dizaine de cavaliers à cheval, lancés à toute allure à travers le désert sous un ciel bleu et légèrement nappé de blanc à l’horizon. Ils tiennent arcs et flèches et se livrent, semble t-il, à une compétition de vitesse et d’adresse comme cela se pratique traditionnellement au Maroc.

Le plan choisi par CAPA est intéressant car il a saisi les cavaliers de face fonçant vers lui comme une horde sauvage prête à en découdre et en légère contre plongée. De ce fait, le sable du désert occupe peu d’espace dans la photographie. En revanche les cavaliers qui occupent la largeur totale du plan sont mis en valeur et paraissent plus imposants sur leur monture et se détachent parfaitement sur le ciel bleu.

 

J’aime cette photographie car il s’en dégage de l’énergie, un sentiment d’espace et de liberté au cœur d’une nature sauvage et riche en couleurs. 

Philippe

 

Comment choisir une photo de Capa parmi les nombreux sujets développés en couleur par l’artiste ? Qu’il ait apposé un regard de connivence sur tous ces « arrière-plans » de la Seconde guerre ou de la guerre d’Indochine (la plus touchante car celle qui lui a été fatale), ou qu’il croque de son objectif sans vergogne des portraits de jeunes de la Génération X, Capa rassemble un large public car tout le monde y trouve son compte. C’est justement ce regard insolite, voire cocasse et cette faculté à capter les divergences et les diversités de la société française, et de s’en amuser, qui m’ont plus spécialement intéressée.

Mon œil s’est arrêté sur la photo d’une Parisienne (un mannequin posant) vêtue d’un tailleur noir à la pointe de l’élégance et de la simplicité des années 50, promenant son chien, un caniche aussi noir que son costume, sur un trottoir de la prestigieuse place Vendôme. A quelques pas derrière elle, un homme trapu en costume de travail et béret, à l’allure rustique, forme un contraste saisissant avec cette Parisienne jusqu’au bout des ongles. Le ciel gris bleu est constellé de traînées de nuages et occupe deux bons tiers de la photo. Au premier plan, à gauche, un imposant réverbère noir luisant arbore fièrement un panneau d’interdiction de stationner qui représente l’unique touche de couleur vive dans ce panorama oscillant entre les gris sombres, les bleus ternes et le noir. 

J’aime particulièrement cette photo car elle m’impressionne par le paradoxe entre ce qu’elle nous montre et ce qu’elle dégage. En effet, au sein de couleurs sombres et de l’austérité de cette place aux bâtiments cossus et imposants, aux lignes verticales et horizontales taillées dans la masse, tout cela renforcé par la présence d’un personnage à l’air bourru et peu abordable, Capa est parvenu à donner une atmosphère de fraîcheur et de légèreté d’un dimanche matin en ville. La posture souple et naturelle de la femme, de laquelle le ciel semble jaillir m’a fait sourire. Voici un beau pari photographique osé mais réussi ! Je remercie M. Capa de cette représentation de la femme, sans artifice et sans détail vestimentaire qui attirerait vulgairement le regard, pleine de vie et de charme naturel. 

Céline

 

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